Le culte de Mithra

Mithra
Dans l'ancien panthéon iranien, Mithra, analogue à l'ancien dieu indien Mitra était le dieu des contrats et de l'amitié, mais il était vénéré également comme le dieu de la lumière et du soleil. Il a joué un rôle important dans les rituels des sociétés masculines en Perse. Plus tard, les soldats romains ont repris les pratiques de ce culte. Les principes éthiques représentaient la justice, la vertu et l'honorabilité des contrats. Il s'assura que l'ordre était conservé dans l'univers au fil des saisons et des jours. Dans sa représentation originale, il était monté sur un char tiré par des coursiers blancs, de sorte que les Grecs l'ont identifié comme leur dieu du soleil, Hélios. Mithra portait également une lance d'argent. Il était également considéré comme l'un des assistants d'Ahura au jugement final quand Ahura mesurerait les actes de l'humanité.
 

 

Tuer le taureau primitif

L'acte le plus important de Mithra fut de tuer le taureau primitif. Il s'agenouilla sur le taureau, l'attrapa par les narines avec sa main gauche et lui arracha la tête. De la main droite, il enfonça son poignard dans la gorge du taureau. Cet acte symbolisait la renaissance de tous les êtres vivants parce que la vie nouvelle était née du sang et du sperme du taureau qui se déversaient sur le sol. Il symbolisait aussi l'apprivoisement et la domination des pouvoirs naturels et sauvages par la règle ordonnée imposée par les humains.

L’apporteur de lumière et le rédempteur

Mithra
Dans l'Avesta, un livre sacré du zoroastrisme, il est dit qu'Ahura Mazda créa et instruisit Mithra, ainsi il devait être adoré comme s'il était le dieu puissant lui-même. Dès le début, Mithra était connu comme le dieu de la lumière et du soleil, et il était représenté soit comme le soleil, soit entouré de rayons de lumière.

En tant que dieu du soleil, Mithra était aussi celui qui donne la vie, et, pendant la période des Parthes (-247, 226), il a été transformé en sauveur, représenté comme un jeune homme avec un casque phrygien, une tunique et une cape couverte de signes du zodiaque. Il a également été introduit dans le panthéon romain en tant que sauveur et rédempteur. Le but des croyants en Mithra était leur salut personnel. Les représentations des mystères mithriaques comprennent une représentation d'un banquet suivi par le dieu du soleil Sol et Mithra.
 

Le culte de Mithra romain

Mithra, qui était supposé être né dans une grotte rocheuse, était vénéré dans des sanctuaires souterrains, appelés les Mithraea. Seuls les hommes pouvaient participer aux mystères gardés strictement secrets. Les adeptes devaient passer par divers rites d'initiation. Les soldats romains, qui se sont familiarisés avec ce culte en Asie Mineure, l'ont ramené avec eux en Europe. Au IIIe siècle, Mithra était lié au dieu soleil de l'État romain, Sol lnvictus (« soleil indomptable »).

Pendant longtemps, le culte accordé à ce dieu était plus puissant que le christianisme.

Le codex de Berlin

Peu de gens s’imaginent que les découvertes de papyrus du siècle dernier faisaient référence à Mithra. Nous ne parlons pas ici de l'utilisation du nom de Mithra dans les Papyrus magiques grecs, où l'une des incantations reçut même le nom de « liturgie de Mithra » par un malheureux écrivain du nom de Dieterich. Le malheureux Dieterich a consacré son livre au grand Franz Cumont, mais Cumont a toujours refusé d'être d'accord avec Dieterich sur le fait que le texte était Mithraïque.

Mais il existe deux papyrus qui semblent inévitablement liés aux rituels d'initiation du culte. Le premier des papyrus est le papyrus Berolinensis n°21196. C'est un objet qui tient dans le creux de la main, ne fait que 8,5 centimètres de large sur 7 de long. Précieusement conservé dans la section égyptienne des Musées d'Etat de Berlin, il date du IVe siècle de notre ère et aurait été trouvé à l'occasion de fouilles menées à Hermopolis (El-Ashmounein) en 1906. Il se compose de fragments d'une seule feuille de papyrus provenant d'un codex. Il a été publié en 1992 par feu William Brashear.

Ce qu'il représente est longtemps demeuré une énigme, jusqu'à ce que William Brashear, décédé en 2000, ne trouve une explication. William Brashear, un chercheur d’origine américaine, a mené une grande partie de ses recherches à Berlin et il l’a étudié en profondeur dans les années 1990. Le document semble impliquer des questions et des réponses et, selon lui, c’est peut-être un catéchisme préparatoire à une initiation. Il y a mention d'un pater – le septième degré d'initiation dans les mystères; de la nuit comme étant le moment d’une cérémonie, de mettre une ceinture ou une ceinture avec 4 glands, de porter du linge, de s'occuper de quelque chose de pointu et de quelque chose de chaud ou de froid, et il est fait mention d’un repas. La ligne 9 du deuxième côté fait référence à « devenir un lion ». Le grade de Lion ne se trouve que dans le culte de Mithra, une religion à mystères venue de Perse, dont on ne connaît pas grand-chose à part les centaines de temples souterrains qu'elle a disséminés de l'Angleterre à la Syrie, dans lesquels ont été retrouvés des autels, frises et sculptures représentant un jeune homme en train de tuer un taureau. La référence au lion associe carrément le papyrus à ce culte.

Le papyrus serait une sorte de mémento présenté sous forme de questions/réponses. Le formulaire préciserait à chaque fois ce que doit dire le candidat interrogé lors d’une initiation ou une épreuve. Il comporte des références à des lions et à un père, et l'une des questions pourrait être : « Pourquoi es-tu devenu lion ? ». Le seul culte comportant le grade de lion est celui de Mithra, d'où l'hypothèse formulée par William Brashear. Ce bout de document constituerait donc l'unique texte liturgique d'un culte mystérieux dont l'écrivain Ernest Renan disait : « Si le christianisme eût été arrêté dans sa croissance par quelque maladie mortelle, le monde eût été mithriaste. » De cette lointaine religion qui s'est épanouie pendant les cinq premiers siècles de notre ère, alors que le christianisme n'en était qu'à ses balbutiements, il ne nous reste aujourd'hui qu'une trace infime : la coutume de célébrer le 25 décembre.

Le deuxième papyrus appartient au 3ème siècle. Il a été publié par Vittorio Bartoletti en deux parties. Il fait référence à des tiges, indiquant des éléments astraux ou astrologiques, et il y a aussi le mot καυτοπαυ, le nom de la divinité ancillaire dans les temples de Mithra. Il y a aussi une référence intéressante à Serapis. La suggestion est que c'est un serment.

Tout cela nous laisse nous demander s’il y avait des mithriastes en Egypte, et si oui, où ?

Le Soleil, Seigneur de l'Empire romain

Mithra, Dieu Soleil
L'historien grec Plutarque (45-125) rapporte l'arrivée en mer Égée, dans l’orient grec, des rites mithriaques, dans le sillage de quelques centaines de pirates originaires de Cilicie (nord-ouest de la Syrie) qui s'attaquaient aux navires croisant en Méditerranée. Soldats, fonctionnaires, négociants voyageant aux confins de l'Empire romain pratiqueront aussi ce culte secret et mystérieux, interdit aux femmes et sans prosélytes. Les adeptes célèbrent probablement le solstice d'hiver, le 25 décembre. C'est la nuit la plus longue de l'année : à partir de cette date, les jours commencent à rallonger, et c'est le triomphe de la clarté. Le 25 décembre serait donc un hommage à la lumière.

C’est une interprétation très cohérente avec la figure de Mithra, dieu perse du Soleil. On peut d'ailleurs noter qu'aujourd'hui encore, le solstice d'hiver est fêté en Iran sous le nom de « nuit de Yalda » : les familles se rassemblent et veillent une grande partie de la nuit dans l'attente de l'astre du jour, en dégustant des fruits à chair rouge orangé (pastèques, grenades, oranges, kakis...) qui rappellent la chaleur et la lumière du Soleil.

Mais dans l'immense Empire romain de ces premiers siècles coexistent de nombreuses autres croyances. Chaque province prie une divinité locale, que ce soit la figure d'Apollon, que ce soit l'Hélios grec ou l’Osiris Égyptien. Une joyeuse diversité qui ne correspond pas à un pouvoir centralisé ... C'est pourquoi, dès le IIIe siècle, l'empereur Aurélien (214-275) institue un seul culte, dans l'objectif d'homogénéiser l'empire et de renforcer son unité. Or, malgré la diversité, un point rassemble la majorité des fidèles des différents cultes païens : l'adoration du Soleil. Quel autre dieu adopter que l'astre du jour, d'autant que le mithriacisme est alors triomphant ? Aurélien établit en 274 le culte du Soleil, et le 25 décembre devient la date du Sol invictus, le Soleil invaincu.

En son honneur, un temple est construit à Rome, probablement au champ de Mars, là où les cendres de César ont été disséminées deux siècles plus tôt. Sur les monnaies émises alors, le buste d'Aurélien est entouré de la formule « Sol Dominus Imperii Romani » (« Soleil Seigneur de l'Empire romain »). Et un nouveau collège de prêtres, baptisé Pontifices Dei Solis, est créé.
 

L'écho des Saturnales

A partir du IIIe siècle, le mithriacisme est concurrencé par le christianisme. L'un des successeurs d'Aurélien, Constantin, d'abord adepte du Sol Invictus, se convertit. Les chrétiens d'alors se soucient peu de la date de naissance du Christ. La mort et la résurrection de Jésus leur paraissent alors bien plus importantes. En outre, célébrer la naissance biologique s'apparente alors à un acte impie, comme c'était le cas pour le pharaon. Ainsi, vers le milieu du IIIe siècle, la.fête de Noël – dont il existe deux interprétation étymologiques : Natalis dies, qui fait référence à la naissance du Christ ou, selon certains celtisants, Noïo Hel (pour « nouveau soleil ») – , est encore inconnue en Occident, et la date de naissance du Christ, indéterminée.

Les premiers chrétiens ne fêtaient pas la naissance du Christ. C'est pour contrer l'ascension des cultes solaires qu'ils imposèrent cette date proche du solstice d'hiver.

Concernant la date du 25 décembre, les historiens ont envisagé l'hypothèse qu'elle soit un écho lointain des fêtes saturnales du calendrier romain, qui avaient lieu du 17 au 23 décembre. Ces fêtes commémoraient le séjour du dieu Saturne dans la future Rome et se déroulaient peu avant la date du solstice : c'était donc une manière de célébrer la fin du règne de la nuit, son crépuscule.

Le 25 décembre est un reste du culte de Mithra

Un point fait l'unanimité parmi les historiens : le choix définitif du 25 décembre est une décision politique et stratégique. Ce jour a été désigné arbitrairement pour une raison précise : faire concurrence au culte de Mithra. Selon l’historien Louis-Marie Duchesne, c'était la seule manière de fusionner les cultes solaires, dont celui de Mithra, et le christianisme.

En 354, le pape Libère déclare donc officiellement que la date de la naissance du Christ est celle du solstice d'hiver. A cette époque, le solstice d’hiver était le 25 décembre et non le 21. Restait à régler le sort du Sol invictus, toujours vivace. L’église de Rome devait en effet se réapproprier le symbolisme de la lumière.

Certes, le Sauveur est présenté comme le Soleil de la justice, mais, comme le raconte Martyne Perrot, c'est une découverte archéologique qui vient conforter l'identité solaire de Jésus. Il s'agit. du « mausolée des Julii, sous la basilique Saint-Pierre au Vatican, où le Christ apparaît sur fond d'or sous les traits du Soleil conduisant son quadrige ». De même, la référence à la lumière se retrouve dans la prophétie d'Isaïe : « Le peuple qui marchait dans les ténèbres a vu une grande lumière. Sur les habitants du sombre pays, une lumière a resplendi. »

En 379, Rome impose donc à tout l'Empire de fêter la Nativité le 25 décembre. C'est le signal du déclin pour Mithra. Le culte disparaît totalement en Occident dès le début du Ve siècle. Pour Robert Tureau, parmi les multiples raisons de ce déclin, il y a le rapport à la mort et une certaine vision de l'homme : « La religion de Mithra du fait de ses références astrologiques, apportait à ses adeptes une explication de l'homme et de l'Univers, de leur histoire. » Le cycle était celui du Soleil, de la domination de la lumière sur les ténèbres grâce au sacrifice du taureau par Mithra. On pense d'ailleurs aujourd'hui que les adeptes ne faisaient lors des célébrations qu'une offrande symbolique – les sacrifices réels concernaient de petits animaux. L'astrologie renforçait la foi en l'accomplissement et la victoire des volontés célestes. Le mithriacisme développait ainsi une rationalité cosmique et vitaliste, mais il ignorait trop sans doute l'angoisse de la mort et la recherche du salut des âmes qui obsédait ces sociétés à la fin de l'Empire Romain.

L'erreur de Sosigène

Seize siècles plus tard, l’Église catholique romaine et l’Église protestante fêtent Noël le 25 décembre, tandis que le Noël orthodoxe est célébré le 7 janvier. Explication de ce décalage : les orthodoxes n'ont pas adopté le calendrier grégorien, en vigueur dans la majorité des pays depuis la fin du XVIe siècle, mais ont conservé celui de César, instauré en 45 avant notre ère.

L'astronome Sosigène d 'Alexandrie est chargé par Jules César de réformer le calendrier. Il devait déterminer pour le début de chaque saison les dates des solstices d'hiver et d'été. Avec les instruments de l'époque, la tâche était bien difficile. Son erreur pour le solstice d'hiver fut de deux jours. Nos calculs d'éphémérides montrent eu effet qu'en 45 avant notre ère, le solstice d'hiver est survenu le 23 décembre. Or, Sosigène le fixe au 25 décembre. Cette erreur est la cause d'une dérive séculaire du calendrier julien de l'ordre de 8 jours par millénaire, puisque l'année julienne comporte 365,25 jours alors que l'année tropique, déterminée par l'orbite de la Terre autour du Soleil, ne dure « que » 365,24219 jours. Pourtant, le calendrier julien sera conservé jusqu'à la fin du XVIe siècle. C'est le pape Grégoire XIII qui décidera d'une nouvelle réforme, le calendrier grégorien. Mais les églises orthodoxes russes et serbes ont conservé le calendrier julien, qui présente un décalage de 13 jours avec le calendrier grégorien. De ce fait, le 25 décembre du calendrier julien correspond au 7 janvier du calendrier grégorien. Mais la naissance du Christ est bien fêtée le 25 décembre, quel que soit le système calendaire en vigueur.

Le problème est qu’on voulait que ça tombe le jour du solstice d’hiver et ça aurait du être le 23 décembre si Sosigène n’avait pas fait une erreur de calcul.

Résumé

Le mithriacisme était un culte solaire au temps de l’Empire Romain. On ne sait pas grand chose sur cette religion qui faisait partie des cultes des mystères. Il se pratiquait la nuit et sous terre.

Les adeptes du culte de Mithra célébraient probablement l’une de leur plus grande fête lors du solstice d'hiver.

Les empereurs romains s’étant convertis au christianisme, ils voulaient imposer à tout l’empire un culte unique. L’Église romaine, pour faire concurrence au culte de Mithra, a délibérément choisi la date de la naissance de Jésus Christ comme correspondant à celle du solstice d’hiver.

L'astronome Sosigène, quatre siècles plus tôt, avait cependant commis une erreur de deux jours pour fixer la date du solstice au 25 décembre alors qu’à l’époque il était en réalité le 23 décembre. On devrait donc fêter le réveillon de Noël le soir du 22 décembre !

Source : D’après un texte de Azar Khalatbari publié dans Science et Avenir




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