Le texte suivant, daté du 7 janvier 1952 et dévoilé par la CIA en 1981 en application de la loi américaine sur la liberté de l’information (
Freedom of Information Act), concerne un projet en deux parties destiné à apprécier l’utilisation possible des
perceptions extra-sensorielles (PES) pour « résoudre des problèmes pratiques en matière de renseignements ».
Ce projet fut envisagé pour mesurer la fiabilité et le caractère reproductible d’expériences menées sur des « individus exceptionnellement doués » et pour rassembler les résultats de toute expérience de
PES pour réaliser des études statistiques. Aucune indication ne permet de savoir si le projet fut réellement mis en œuvre.
Voici le texte du mémo, suivant une traduction de
David Dennery :
Au delà de tout doute, il nous apparaît maintenant de façon claire qu’il réside en certaines personnes une capacité particulière pour les perceptions extra sensorielles (PES). Ce fait, et les développements qui en découlent, devraient avoir des conséquences importantes pour l’activité des services de renseignements.
Très peu de personnes ont effectué des recherches dans ce domaine jusqu’alors, et jamais dans le but proposé ici, ni pour quelque application pratique d’ailleurs. Cependant, ayant à présent établi certains faits de base, après de longs et patients efforts qui rencontrèrent plus de résistances que de soutiens, il apparaît que nous sommes prêts à considérer la question des applications pratiques.
Il existe deux lignes principales de recherche qui sont caractérisées par les promesses qu’elles suggèrent et qui ont besoin d’être développées dans l’optique d’une application aux activités du renseignement. Ces deux pistes recueillent toutes les informations permettant d’accroître notre compréhension de ce qui se passe lors des expériences de PES, et sont donc susceptibles de nous donner l’avantage concernant leur utilisation et la maîtrise du phénomène. Par conséquent, le projet d’étude financé par Rockfeller visant à définir les personnalités susceptibles de PES et les avancées dans le domaine des PES chez les animaux, récemment entrepris, ainsi que de nombreuses autres opérations d’études, nous sont très utiles.
Les deux projets particuliers de recherche aujourd’hui à l’étude et qui devraient être soutenus sont : premièrement la recherche et l’entraînement des individus exceptionnellement doués capable d’approcher un succès complet lors des tests de PES ; deuxièmement la collecte statistique des cas d’expériences de PES afin d’affiner et de parvenir, à terme, à une fiabilité totale en vue de l’exploitation. Chaque cas de PES est bien défini. C’est avec cette idée présente à l’esprit que nous devons faire un effort important afin de pousser cette recherche dans la direction menant à des applications fiables pour les questions pratiques intéressant les renseignements.
D’abord, un mot sur ce sujet très spécial. A de nombreuses occasions au cours de l’année, plusieurs chercheurs scientifiques ont obtenu, sous d’excellentes conditions de contrôle, de remarquables séries d’expériences de PES réussies. Les conditions ne laissaient pas de place au doute. L’une d’entre elles, au moins, se déroulait en plaçant un jeu de fiches cibles et un expérimentateur dans un immeuble et le sujet récepteur sensible dans un autre à plusieurs centaines de mètres du premier.
A cause de la nature insaisissable et inconsciente de la capacité à expérimenter des PES, ces mêmes sujets n’ont pu répéter leurs réussites d’une façon fiable et durant ces années d’études dans des conditions très strictes, il n’a pas été possible de résoudre ce problème et de dépasser cette difficulté pour amener cette capacité au stade de la maîtrise. Nous avons récemment découvert deux sujets pour lesquelles on rapporte une capacité à garder un taux de succès quasi ininterrompu sur des périodes significatives.
Ces études ont été effectuées dans des laboratoires scientifiques et nous n’avons pas de raison de douter de leur valeur. Nous n’avons pas pu amener ici ces deux sujets très doués ni étendre notre examen aux laboratoires concernés. Il semble cependant que dans ces deux cas, le problème d’un contrôle de la fonction de PES ait été résolu. Si c’est le cas, le reste du chemin qui mène aux applications pratiques nous paraît être une question technique sans difficulté insurmontable. Même si l’un ou deux de ces cas s’avèrent invalides, nous considérons cette éventualité de maîtrise du phénomène comme possible, et nous avons dans nos cartons de nombreuses idées de voies de recherche propres à la rendre effective.
Je ne m’étendrai pas ici sur les développements techniques et pratiques de la possibilité de recueillir des informations télépathiquement comme il en a été fait la démonstration lors des expériences utilisant des fiches. Nous verrons que si un sujet, dans les conditions d’études, peut identifier l’ordre de disposition des cartes sur un tableau à plusieurs centaines de mètres de distance, ou bien est capable d’identifier la pensée d’une autre personne éloignée de plusieurs kilomètres, l’adaptation aux exigences du terrain pour l’obtention d’informations secrètes ne devrait pas présenter de sérieuses difficultés.
Nous croyons que l’effort de recherche doit se concentrer sur un autre aspect pratique qui est celui du développement des moyens d’exploitation des faibles pourcentages de réussite pour établir un jugement fiable. Nous explorons toujours cette voie d’application, mais nous sommes allés suffisamment loin pour observer qu’elle est tout à fait praticable et intéressante. Elle permet d’utiliser les faibles taux de succès dès que ceux-ci dépassent la simple probabilité due au hasard. Ainsi, on peut concentrer ces minces résultats à un point permettant leur utilisation pour obtenir une information pratiquement fiable. Je crois que vous avez examiné cette question de près avec (nom de personne ou d’organisme effacé), je ne m’étendrai donc pas ici sur les procédures et les techniques rendant utilisables ces résultats.
Si nous devions pousser ces recherches dans la direction des applications pratiques pour les renseignements, il deviendrait nécessaire de porter une extrême attention au camouflage minutieux de cette entreprise. Je souhaiterais qu’alors au sein de (mots effacés), seuls (deux noms effacés) et moi-même, soient au courant, étant tous trois astreints au “secret” pour des raisons de sécurité. Je me sentirais peut-être tenu de discuter confidentiellement du sujet avec (nom ou noms apparemment effacés). Les fonds nécessaires devront, comme on peut aisément le comprendre, rester dissimulés afin de ne pas soulever d’interrogations. Même s’il n’y a pas de raison de négliger l'éventualité de dépenses supplémentaires et de renégociation nécessaires des budgets alloués, celles-ci ne peuvent être évaluées à ce stade de développement.
Aussi je préfère procéder à une évaluation restreinte du projet dans ses implications financières. J’évalue à cinq personnes la taille de l’équipe de recherche pour commencer. Elle travaillera sans limitation préétablie et devra échanger beaucoup.
Aucun de ses membres ne sera recruté au sein du (plusieurs mots effacés), une unité séparée. Pour l’objectif poursuivi aujourd’hui, cependant, le (effacé) peut considérer que ce type de test devrait mobiliser (nom effacé), un statisticien très qualifié et deux chercheurs compétents, non seulement pour gérer les groupes de sujets participants, mais aussi pour travailler aux procédures d’évaluation.
L’estimation de la masse salariale représentée par ces cinq personnes se situe entre 22500 $ et 25000 $. Afin de tirer parti de l’aide de l’informatique dans le travail statistique, pour plusieurs autres postes dont les frais de déplacement, il serait sage de prévoir en plus une enveloppe de 5000 $. On peut prudemment parler d’une dépense de 30000 $ pour la première année. Connaître ce vers quoi nous tendrons pour l’année suivante revient aujourd’hui à poser une devinette, mais il s’agira presque certainement de consacrer plus et même beaucoup plus de crédits. Je doute qu’il serait intéressant de tenter d’en fixer le montant maintenant.
Après avoir été si frustré d'avoir dû composer avec des projets à court-termes et gaspillé mes forces pour tenter de travailler à plus long terme, je dois vous déclarer que, sans la solide assurance de l’engagement d’un programme d’au moins trois ans, je n’essaierai pas de rassembler le personnel, d’établir le programme de recherche et de fournir l’effort que demande une entreprise majeure telle que celle-ci.
Parce que je pressens l’urgence pour notre pays de jouer un rôle aussi dominant que possible dans ce domaine, je pense qu’il n’est pas souhaitable d’entreprendre ces recherches en l’absence d’une confiance suffisante entre les deux parties concernées.
Après tout, ces crédits à court terme sont la manifestation d’une confiance limitée. Je dois ajouter qu’alors que les Soviétiques annoncent leur désintérêt officiel et celui de leurs psychologues pour ce type de recherche, tenus qu’ils sont par le matérialisme de l’idéologie marxiste, j’ai pu déceler plus d’un détail faisant référence au fait qu’ils ont déjà réalisé ce type d’études pour pouvoir en donner ainsi une interprétation matérialiste.
J’apprécierais beaucoup si vous pouviez me donner des informations à ce sujet. A l’occasion nous pourrions discuter de ce que les nazis avaient entrepris de faire...