L’histoire des Vampires depuis l’Antiquité

Introduction de ce grand article sur les Vampires

Femme Vampire et le Diable
Vampire femelle forniquant avec le Diable
Ce qu'il y a de plus étonnant dans l'histoire des Vampires, c'est qu'ils ont partagé avec nos grands philosophes l'honneur d'étonner le 18e siècle ; c'est qu'ils ont épouvanté la Lorraine, la Prusse, la Silésie, la Pologne, la Moravie, l'Autriche, la Russie, la Bohème et tout le nord de l'Europe, pendent que les sages de l'Angleterre et de la France renversaient d'une main hardie et sure les superstitions et les erreurs populaires et menaient une chasse aux sorcières condamnant des centaines de milliers d’innocentes à périr dans les flammes du bûcher.

Chaque siècle, il est vrai, a eu ses modes ; chaque pays a eu ses préventions et ses maladies ; mais les Vampires n'ont point paru avec tout leur éclat dans les siècles barbares et chez des peuples sauvages ; ils se sont montrés au siècle des Diderot et des Voltaire, dans l'Europe, qui se dit civilisée.

Et tandis que ces spectres désolaient le Nord, le Midi exorcisait les possédés ; l'Espagne et l'Italie condamnaient des sorciers ; Paris assistait aux convulsions du cimetière Saint-Médard.

 

Définition de ce qu’on entend par un Vampire

Jeune femme vampire ensanglantée
On a donné le nom d'upiers, oupires, et plus généralement vampires, à des hommes morts depuis plusieurs années, ou du moins depuis plusieurs mois, qui revenaient en corps et en âme, parlaient, marchaient, infestaient les villages, maltraitaient les hommes et les animaux, suçaient le sang de leurs proches jusqu’à l’épuisement et pour finir leur causaient la mort.

On ne se délivrait de leurs dangereuses visites et de leurs infestations qu'en les exhumant, les empalant avec un pieu, leur coupant la tête, leur arrachant le cœur ou en les brûlant. Plus tard, après l’invention de la poudre à canon, on fit la découverte qu’une balle en argent pouvait également les détruire (et non pas tuer car ils sont déjà morts).

Ceux qui mouraient sucés par un Vampire devenaient Vampires à leur tour. C’est comme une maladie qui se transmet à la manière d’une épidémie de grippe. Il n’existe aucun vaccin contre cette terrible maladie.

Ce qu’on sait sur eux est qu’ils opèrent en général la nuit car ils ne supportent pas le soleil. Les rayons de l’astre du jour peuvent les endommager sérieusement et même les détruire. C’est pourquoi on s’imagine souvent les Vampires dormir pendant la journée dans un cercueil en bois installé au fond d’une cave obscure et sans fenêtre.

Le petit nombre de savants qui jusqu'ici ont écrit sur les Vampires soutiennent que l'antiquité n'a eu aucune connaissance de ces sortes de spectres. Il n'est peut être pas impossible de prouver que les anciens avaient aussi leurs Vampires ; et c'est ce que nous allons essayer de faire avant de passer aux aventures toutes récentes qui feront l’objet d’un autre article.
 

Des Apparitions chez les peuples anciens

Nous parlerons dans cette première partie des différents Vampires qui ont pu se montrer jusque vers le 12e siècle. La seconde partie suivra ces mêmes spectres jusqu'aux jours de leur lustre et jusqu'à la décadence du Vampirisme au milieu du XVIII° siècle avant de revenir en force à la fin du XX° siècle et au XXI° siècle, notamment en raison du cinéma et de la télévision.

Un Vampire est un mort qui sort du tombeau, un revenant matériel qui apparaît, qui tourmente, qui annonce la mort, qui la donne, et contre qui il faut procéder. Les vampires sont donc très semblables aux zombies de Haïti, à la différence près qu’ils sucent le sang de leurs victimes.

Il n'est pas besoin de dire que les apparitions ont été des objets sacrés de croyance chez toutes les nations anciennes. Dans l'enfance des peuples, c'est à dire à toutes les époques d'ignorance et de barbarie, les hommes vivant isolés ont engendré des terreurs et aussitôt des superstitions.

Ils trouvaient dans leurs cœurs la certitude de l'existence d'un Dieu ; mais le sentiment du libre arbitre (qui ne peut exister que si le monde n'est mêlé de biens et de maux, de vices et de vertus) était d'une métaphysique trop profonde pour frapper des âmes grossières. Ils imaginèrent un génie méchant qui présidait à tous les maux de la terre, et qui était en continuelle opposition avec Dieu, auteur du bien, créateur et conservateur de la nature ; ils donnèrent à ce mauvais génie des esprits subalternes, exécuteurs de ses ordres. Des esprits envoyaient les tempêtes, les météores, les orages ; mais ils ne se montraient que la nuit parce qu'ils redoutaient Dieu, beaucoup plus puissant qu'eux.

La Bretagne et le Valais Suisse

Monstres valaisans
Monstres lors d'un carnaval valaisan (Suisse)
Les habitants des côtes de la Bretagne, qui peuvent encore nous donner une vague idée des peuples enfants, conservent toutes ces opinions. Chez eux l'homme rouge parcourt la nuit les bords de la mer, et y précipite l'imprudent qui ose affronter son approche ; le fantôme volant déracine les arbres, renverse les chaumières. Mille spectres semblables sèment l'effroi autour des cabanes. Au murmure des vents, au bruit lointain des vagues agités, le paysan breton mêle, dans son esprit troublé et alcoolisé, les cris de pêcheurs malheureux que les démons étouffent ou qu'ils entraînent au sein des flots. Il est probable que tous les peuples anciens eurent des idées pareilles.

On retrouve ces légendes chez les habitants des zones montagneuses éloignées de toutes civilisations où il existe beaucoup de consanguinité. C’est le cas du Valais Suisse où, encore au XX° siècle, les gens d’une vallée ne comprenaient pas ceux de la vallée d’à côté car ils ne parlaient pas la même langue. On pense que la Suisse ne reconnaît que quatre langues officielles, mais il en existe des dizaines d’autres toujours pratiquées dans ce pays enclavé au milieu des montagnes. Les langues officielles ne concernent que les langues écrites. Les autres langues sont uniquement orales et ce sont surtout elles qui colportent les légendes millénaires lors des longues soirées d’hiver.

Or, lorsqu'un individu égaré périssait sous la main des brigands, on sous les coups de la tempête, ou par tout autre accident, on racontait qu'un mauvais génie l'avait tué. On inventa même des anges de la mort, des démons, qui venaient prendre et emporter l'être qui partait de ce monde. On ne croyait donc pas que la mort fût un anéantissement total : on savait déjà que l'âme survit à sa dépouille ; de là au système des revenants il n'y eut qu'un pas. L'âme qui avait été arrachée à de tendres affections venait effrayer ses ennemies, les tourmenter, leur annoncer la mort.
 

Vampirisme chez les Juifs, les Grecs et les Romains

Lorsque la sorcière d'Endor fait paraître Samuël devant Saül, le fantôme dit au roi : Demain toi et les fils vous viendrez me rejoindre. Il est certain qu'alors la foi aux apparitions était répandue chez les Juifs, puisque Saül demande une femme qui sache évoquer les esprits ou revenants.

Anchise se montre à son fils dans l'Enéide, Romulus apparaît après sa mort ; il y a des apparitions dans Homère et dans tous les monuments anciens ; et sans doute parmi les spectres d'alors il y avait déjà des Vampires, puisqu'on leur offrait du sang. Lorsqu'Ulysse évoque l'ombre de sa mère, il lui fait boire du sang de bélier noir ; et toutes les autres ombres sont si avides de ce régal qu'il est obligé de les éloigner avec violence pour laisser à Anticlée tous les plaisirs du festin.

On voit dans les œuvres de Théocrite que les anciens bergers craignaient extrêmement le démon de midi. Sous une forme d'homme, ce démon était Pan : avec une figure de femme, il se nommait Empuse. Aristophane, dans sa comédie des grenouilles, représente l'Empuse comme un spectre horrible, qui prend diverses formes, de chien, de femme, de bœuf, de vipère, etc. Il a le regard atroce, un pied d'airain, une flamme autour de la tête, et ne cherche qu'à faire du mal.

Les paysans grecs et russes, qui ont conservé les idées populaires attachées à ce monstre, tremblent au temps des foins et des moissons à la seule pensée du démon de midi, qui, dit-on, rompt bras et jambes aux faucheurs et aux moissonneurs s'ils ne se jettent la face en terre lorsqu'ils l'aperçoivent.

On lit dans la vie de A Grégoire de Néocésarée qu'un diacre de cet évêque, étant entré un soir dans un certain bois, où tous ceux qui se montraient étaient mis à mort, y vit une foule de spectres de toute sorte, dont il ne se délivra que par des signes de croix.

Le grave Mélanchton lui-même raconte que sa tante fut estropiée par un attouchement perfide du spectre de son défunt époux, qui, en lui serrant la main, la lui brûla.

La chronique de Sigebert donne comme un fait certain qu'en l'an 858 il apparut, dans un village du diocèse de Mayence, un fantôme malfaisant, qui battait les voisins, et troublait la paix des ménages par des révélations indiscrètes : il mettait le feu aux cabanes, ce qui était beaucoup plus sérieux, et brûlait les moissons. On voulut l'exorciser ; mais il répondait par des grêles de pierres aux prêtres qui lui jetaient de l'eau bénite, et, comme on en venait aux grands moyens, il se glissa sous la chape d'un prêtre, qu'il fit fuir en lui reprochant d'avoir corrompu des filles : enfin ce fantôme ne quitta le village que quand il l'eut tout brûlé….

D. Calmet raconte, après les annales de la Société de Jésus, la triste aventure d'une jeune servante de Pérou, à qui un esprit donna un coup de pied dans l'épaule pendant qu'elle dormait. L'amant de cette fille fut tiré de son lit par le même fantôme. Un pot à beurre et un crucifix, qui se trouvaient dans la cuisine, furent brisés en mille pièces. On reconnut que tout ce désordre était l'ouvrage d'une jeune fille se seize ans, morte sans absolution.

Les Vampires annoncent la mort

Crane de vampire
Les fantômes dont on vient de parler n'apparaissent que pour tourmenter et battre. Les Vampires en faisaient autant, et de plus ils annonçaient la mort ; ou par leur simple apparition, ou par des paroles formelles.

Sans avoir le nom de Vampires une multitude de spectres ordinaires ont apporté également des nouvelles de mort. Dion de Syracuse, étant une nuit éveillé dans son lit, aperçut une grande femme, semblable à une furie, qui balayait sa maison. Ce spectre disparut dès que Dion eut appelé du monde. Mais son fils se tua quelques jours après ; Dion lui même fut assassiné, et sa famille fut balayée de Syracuse, comme le spectre avait semblé l'en avertir.

C'était, il n'y a pas encore longtemps, une croyance générale dans le pays que, toutes les fois qu'il devait mourir quelqu'un de la maison de Brandebourg, un spectre de femme parcourait les appartements du prince avec une chandelle à la main. Un page voulut, dit-on, arrêter un jour cette coursière de mort ; mais le fantôme le saisit à la gorge, et l'étouffa….

Cardan écrit également que dans la maison d'une noble famille de Parme, lorsque quelqu'un devait mourir, on ne manquait pas de voir un spectre de vieille assis sous la cheminée.

Toutes les fois que quelqu'un de la famille de Lusignan est menacé de quelque disgrâce, ou qu'un roi de France doit mourir d'un manière extraordinaire, la fameuse Mélusine vient pousser des cris sur les tours du château qu'elle a fait bâtir (1)…Cependant il y a près de deux siècles qu'elle ne s'est montrée.
 

Des démons qui donnent la mort

Le vampire de Venise
Le Vampire de Venise
Ce n'était pas assez d'imaginer les apparitions, de les rendre effrayantes; l'homme, généralement mauvais, attribua aux esprits et revenants ses qualités méchantes : il avait donné aux fantômes, que sa faiblesse venait de créer, le penchant et la pouvoir de tourmenter les vivants. Les spectres annoncèrent la mort, et bientôt ils l'apportèrent avec eux.

Il est vrai que l'on ne conçoit pas aisément comment un esprit peut donner un coup de pied dans l'épaule d'une jeune fille, ou un coup de poing dans le ventre d'un pauvre homme ; mais il ne faut s'étonner de rien avec les légendaires et les démonomanes. Césaire de Citeaux conte, dans son livre de miracles, qu'un moine ayant passé devant un tableau qui représentait Saint Jean-Baptiste, sans le saluer comme la révérence l'ordonne, l'image du saint se détacha de la toile, renversa le moine et l'éventra à coups de pieds.

Puisque les revenants et les spectres se battent sensiblement avec les hommes, sans doute faut-il admettre qu'ils apparaissent en corps et en âme comme les Vampires ; autrement le plus subtil théologien ne pourra expliquer leur action. Amphiloque dit, dans la vie de Saint Bazile, que le spectre de Saint Mercure tue l'empereur Julien : il est vrai que ce fut avec une hallebarde de Suisse ; mais encore fallait-il une main pour le porter.

Saint Grégoire de Nysse assure que, dans la grande peste qui ravagea la ville de Néocésarée, on vit en plein jour des spectres qui entraient dans les maisons, et y apportaient la mort.

Jean, évêque d'Asie, dit que pendant la grande peste qui eut lieu sous l'empereur Justinien, on voyait dans les barques d'airain des spectres noirs et sans tête, qui voguaient sur la mer, et s'avançaient vers les lieux où l'épidémie commençait ses ravages. Cette infection ayant dépeuplé une ville d'Egypte, de sorte qu'il n'y restait plus que huit personnes, ces malheureux voulurent se sauver ; mais ils furent arrêtés par les spectres, et partagèrent le sort de tous leurs compatriotes.

Le même évêque Jean raconte aussi que, dans une grande peste qui enlevait à Constantinople quinze à seize mille personnes par jour, on voyait par la ville des démons et des fantômes qui couraient de maison en maison, sous des habits de moine, et qui y apportaient la mort. Ce dernier trait ressemblerait à une épigramme s'il ne nous venait d'un saint évêque qui n'en faisait pas.

Les Musulmans croient aussi que les ombres des méchants peuvent donner la mort. On cite je ne sais quel petit prince qui, ayant tué son père pour avoir ses états, fit mourir encore son fils afin de régner plus paisiblement. Le spectre paternel l'avait épargné ; le fantôme de son fils le poursuivit sans relâche, en lui disant. Je te tuerai comme tu as tué ton père. Le petit despote tomba de cheval, et en mourut.(2)

Dans les contrées soumises à Mahomet on admet également des esprits (Fagia ou Fages) qui donnent la mort aux hommes. Ces esprits sont les mêmes que les anciens ont appelés stryges. On voit dans la bibliothèque orientale de d'Herbelot que le sultan Moctadi-Bemvilla, fut tué dans un festin, au milieu de ses femmes, par un de ces esprits malfaisants.

Nous donnons de même aux démons le pouvoir d'étouffer, d'étrangler, d'emporter les vivants. On sait que le diable tua les sept premiers maris de la jeune Sara ; qu'un mauvais ange extermina les premiers nés des Egyptiens ; qu'un autre tua ceux des Hébreux qui murmuraient dans le désert ; qu'un autre ou peut-être le même fit un horrible massacre de l'armée de Sennachérib, etc.

 
Notes :
(1) Dictionnaire Infernal, par M. Collin de Plancy, aux mots Apparitions, Fantômes, Mélusine.
(2) Quelques historiens rapportent qu'à la sortie d'Antioche l'ombre de l'empereur Sévère apparut à Caracalla, et lui dit pendant son sommeil : "Je te tuerai tu as tué ton frère."

Source :
Histoire Des Vampires et Des Spectres Malfaisants Avec un Examen du Vampirisme
par Collin de Plancy





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